Du 1er au 9 février, se tenait à Papeete le FIFO, Festival international du film documentaire océanien de Tahiti. J’en avais entendu parler par une connaissance et j’ai souhaité participer à l’événement. J’ai assisté à la projection de 4 films en compétition et 3 films hors compétition. Je vous fais un résumé des films et vous donne mon avis sur ceux-ci.


FILM EN COMPÉTITION DU FIFO

Rurutu, terre de Umuai

Réalisé par Teiva Drion et Virginie Tetoofa
Lieu : Polynésie française

Documentaire sur une tradition de Rurutu, île située dans l’archipel des Australes en Polynésie française : le Umuai, l’organisation de mariages collectifs. 

Mon avis

Intéressant documentaire sur une tradition hors du commun qui peut prendre jusqu’à 5-6 ans d’organisation. Il manquait cependant d’explications sur cette tradition qui a été mise en place pour éviter les mariages entre famille et la consanguinité. Le Umuai est souvent organisé pour marier le dernier enfant de la famille. Il est l’occasion de remarier les autres enfants. Ce qui pour moi correspond au renouvellement des vœux de mariage. Les enfants célibataires et/ou enfants adoptés participent également au Umuai.

Toutes les familles de l’île qui ont un lien avec ceux qui font leur Umuai participent à l’événement afin de retracer la généalogie de la famille.

Jour 1. La famille du père
Jour 2. La famille de la mère
Jour 3 à 6. Les cousins
Jour 7. Le mariage religieux

Durant une semaine, les mariés sont fêtés et couverts de cadeaux par leurs proches. 

Les réalisateurs étaient présents à la fin de la projection. J’ai retranscrit une question qui a été posée dans le public : qu’est-ce qui vous a motivé à faire ce film ? 

Leur réponse est la suivante :
Teiva Drion : amour des parents envers leurs enfants
Virginie Tetoofa : intérêt pour la culture polynésienne


Ruahine, stories in her skin

Réalisé par Hiona Henare
Lieu : Nouvelle-Zélande

Documentaire sur le moko kauae (tatouage du menton), un art ancestral pratiqué par les femmes maoris.

Mon avis

Le documentaire manquait d’explications. J’ai dû effectuer quelques recherches pour comprendre réellement le sens de ce tatouage. C’est dommage car l’importance de cet acte pour l’individu qui le fait et pour la communauté est perceptible. Tout autant que l’émotion qui en dégageait. Deux femmes des tribus Ngai Tara et Mauapoko reçoivent leur moko kauae lors d’une cérémonie bercée de chants traditionnels. Le moko kauae est un symbole identitaire pour affirmer la force d’une femme maori. Elles affirment par le moko leur droit de naissance, leur identité et invoquent le mana de leurs Anciens.

🏆 Ce documentaire a obtenu le 3ème PRIX SPÉCIAL DU JURY.


Eating up easter

Réalisé par Sergio M. Rapu 
Lieu : Île de Pâques

Documentaire sur les actions de la communauté Rapa Nui face aux conséquences de la mondialisation et du tourisme sur l’île de Pâques.

Le film met en lumière les efforts de 4 Rapa Nui :

  • Mama Piru est en charge de la centrale de recyclage de l’île et organise régulièrement des nettoyages du littoral pour réduire l’accumulation de déchets sur l’île, mais elle a du mal à faire participer sa communauté.
  • Les musiciens Mahani et Enrique construisent une école de musique. Ils ont l’idée d’utiliser des matériaux de construction inhabituels : des déchets locaux (bouteilles en verre, cannettes, pneus). Le but de cette école (gratuite) est de réunir leur communauté divisée et transmettre aux jeunes générations culture et tradition.
  • Sergio, le premier gouverneur et archéologue de Rapa Nui, embrasse les avantages du développement en créant le premier centre commercial de l’île. Il est cependant tiraillé par son désir de sécurité financière et l’envie de laisser un héritage durable à sa famille et à son peuple.

Se pose alors la question suivante : est-ce que durabilité et rentabilité peuvent coexister ?

Mon avis

Documentaire très intéressant sur cette communauté indigène semi moderne qui se transforme sous les effets de la mondialisation et du tourisme. Je suis ravie de voir qu’il y a toujours une poignée de gens concernés par la transmission de la culture locale et qui y mettent du cœur à l’ouvrage. Leurs idées sont géniales, leur passion est forte, mais je suis sceptique quant aux bénéfices de ces petites actions face à une île en plein développement.


Blue Boat

Réalisé par Dominique Roberjot et Christine Della-Maggiora
Lieu : Nouvelle-Calédonie

Documentaire sur l’invasion vietnamienne des espaces maritimes des territoires du Pacifique dont le territoire néo-calédonien ayant pour conséquence le pillage des ressources halieutiques (exploitation des ressources vivantes aquatiques).

Mon avis

Déjà que je n’étais pas fan des Vietnamiens depuis mon expatriation de quelques mois à Hanoï… Cependant, pour leur défense, ce sont les conditions de vie de ces pêcheurs clandestins qui les poussent à aller en dehors de leurs territoires et à pratiquer une pêche illégale. Motivés par une surconsommation provenant principalement de la Chine. Les Chinois… on en parle ou je m’abstiens ?


FILM HORS COMPÉTITION DU FIFO

Polynésie : la quête des profondeurs

Réalisé par Vincent Pérazio
Lieu : Polynésie française

Documentaire sur la mission « Deep Hope » des explorateurs sous-marin Ghislain et Emmanuelle Bardout et leur collectif Under the pole. En Polynésie, ils partent explorer l’un des écosystèmes les plus méconnus de la planète : les coraux des profondeurs.

Le collectif a été interpellé par la théorie du refuge du CRIOBE, centre de recherche sur les écosystèmes coralliens, supposant que les coraux des profondeurs pourraient, en émettant des larves, aider à repeupler les récifs coralliens / recoloniser la surface.

Pendant 12 mois, le collectif Under the pole, accompagné de scientifiques, a étudié les coraux crépusculaires, jamais étudiés, afin de savoir s’il y avait un espoir pour les récifs coralliens. Ils ont enchaîné des centaines de plongées dans les 5 archipels de Polynésie, les îles de la société, les Tuamotu, les Marquises, les Gambiers et les Australes. 

Ils ont découvert lors de cette exploration en Polynésie des coraux encore jamais identifiés. Et surtout que des coraux pouvaient vivre à des profondeurs extrêmes, entre 30 et 170 mètres. Un espoir pour les récits coralliens, menacés par le réchauffement climatique et la pollution.

Mon avis

Gros coup de cœur pour ce documentaire. J’ai été fascinée par le récit de ces explorateurs, de leurs études et découvertes. J’ai été très touchée par l’engagement du collectif et la passion de ces individus.


Ma’ohi Nui, Terre de marchandises

Réalisé par Benoit Tarahu et Jeanne Phanariotis
Lieu : Polynésie française, Tahiti

Documentaire qui met en lumière un sujet sensible à Tahiti : le foncier ; les problèmes d’indivision qui affectent, depuis des années et encore aujourd’hui, la population polynésienne.

Le documentaire revient sur l’histoire du droit foncier en Polynésie, qui, avant la colonisation, était géré par la communauté. À savoir que la notion de « propriété individuelle » n’existait pas. Il suit le cas de familles expulsées de leur terre, ils racontent les conséquences de la législation et les batailles juridiques.

Mon avis

En tant que métropolitaine (non propriétaire), je suis à mille lieux d’imaginer ce que vivent ces Polynésiens. Je ne suis pas concernée par ce sujet, cependant j’ai été touchée par le combat que mènent de nombreuses familles pour revendiquer leurs terres.


ÉCRAN OCÉANIEN DU FIFO

Les enfants du corail

Réalisé par Krim Mahdjouba
Lieu : Polynésie française, Moorea

Documentaire sur un groupe de jeunes vivant sur l’île de Moorea, passionnés de surf et de pêche. Amoureux de leur océan, ils se mobilisent pour la sauvegarde du récif corallien.

Mon avis

Deuxième coup de cœur du FIFO, sur la même thématique : l’environnement marin. J’ai été impressionnée par l’engagement de ces jeunes. Ils ne se sont pas arrêtés à la simple prise de conscience, ils ont fait des recherches, ils sont allés rencontrer des spécialistes, ils se sont formés pour créer une pépinière sous-marine à Moorea. Depuis 3 ans, ils collectent des coraux partiellement vivants, coupent et conservent la partie vivante afin de les replanter ailleurs dans les fonds marins. Grâce à leurs actions, le récif de Moorea retrouve ses couleurs ! Merveilleux !

J’ai eu la chance de rencontrer les membres de l’association Coral Gardeners à la suite de la projection et je me suis permis d’aller les remercier pour ce qu’ils font quotidiennement pour lutter contre le réchauffement climatique. Maintenant j’ai hâte d’aller voir le fruit de leurs travaux de mes propres yeux. Encore merci les gars ! 🙏


Le FIFO est un événement à ne pas manquer si vous êtes à Tahiti à ce moment-là. Je vous conseille de regarder en amont les bandes annonces des films en compétition, de lire les synopsis des films hors compétition et de faire votre petite sélection en fonction de vos intérêts pour un sujet en particulier et/ou pour un territoire. Personnellement, j’avais sélectionné les films en lien avec la Polynésie et l’environnement. L’intrus était le film sur le tatouage maori mais vous connaissez mon amour du tatouage, je n’ai pas besoin de me justifier.

Pour information, le FIFO c’est aussi des ateliers, des rencontres avec des professionnels de l’audiovisuel et des colloques.

INFOS PRATIQUES
📍 Maison de La Culture
💰 1 jour = 1 000 francs (8,40€)
💰 3 jours = 2 500 francs (20,95€)
🔗 www.fifotahiti.com